La mort de l’affect dans « The Atrocity Exhibition » (1970) et « Crash » (1973) de James G. Ballard, clinicien de son époque
Résumé
Le but de cet article est d’étudier ce que Ballard appelle « la mort de l’affect », phénomène qu’il met en scène dans un univers urbain peuplé de personnages qui ont perdu la faculté d’éprouver des sentiments et d’exprimer des émotions. Selon lui, ce phénomène est causé par l’époque sur laquelle il écrit, les années soixante, qu’il voit caractérisées par la violence, l’explosion du paysage médiatique et le développement du paysage technologique. Deux traumas symbolisent cette violence : l’assassinat de Kennedy et la guerre du Vietnam. Mais à force de montrer et commenter de tels événements jusqu’à saturation, les médias émoussent la faculté du public à s’émouvoir. Ces medias contribuent aussi à valoriser à l’excès l’apparence, la posture. Que l’on soit dans la politique ou le spectacle, les émotions des figures publiques sont simulées, celles des auditoires sont conditionnées. Quant à la société de consommation, elle réduit l’humain à un corps-objet, voire à un sujet d’expérience. Tout autour, un paysage technologique de béton et d’acier encourage cette modification de comportement, à tel point que l’homme s’identifie à la machine, nouveau compagnon de sa sexualité, nouvelle expression de ses pathologies. En adoptant un style froid et dépassionné, en multipliant les listes et les inventaires, Ballard est à l’unisson de son sujet, qu’il dissèque comme un cadavre pour mieux exorciser ses propres fantômes.
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