De la parole vers la musique : Mário de Andrade à la recherche d’une langue brésilienne
Résumé
L’article porte sur la première manifestation littéraire du projet majeur de la littérature moderniste au Brésil : celui d’élaborer une « langue brésilienne ». Au cours des années 20, les écrivains d’avant-garde brésiliens ont essayé de fabriquer un langage qui leur permettrait d’exprimer et de représenter, d’une manière appropriée et authentique, les spécificités sociales et culturelles du pays. L’analyse proposée ici se concentre sur la technique du « vers harmonique », développée dans l’œuvre inaugurale du modernisme brésilien, São Paulo hallucinée, de Mário de Andrade, écrivain qui a porté la recherche d’une langue brésilienne à ses ultimes conséquences. Ce recueil de poèmes constitue le premier moment du programme linguistique de l’auteur. Bien que l’on n’y trouve pas encore tous les éléments de ce projet, le livre met déjà en scène la tendance principale : celle du passage de la parole à la musique. L’effort de formuler un langage accordé à la matière sociale brésilienne conduit le poète à pousser la parole à ses limites – plus précisément, à celles de son abolition au seuil de la musique. Ce mouvement contradictoire vers l’abstrait n’est pourtant pas analysé ici de façon abstraite ; bien au contraire, il est considéré sous une perspective historique : il est compris comme une solution esthétique extrême aux antagonismes irréductibles qui constituaient la société brésilienne au début du XXe siècle.
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